Situé en vallée d’Aspe sur le GR10, le chemin de la Mâture est un des fleurons français des itinéraires de randonnée.

Dès potron-minet le randonneur encore endormi, quitte Etsaut pour la longue montée de la Baigt de Sencours.
Face à lui se dresse la silhouette peu amène du fort du Pourtalet. Subitement, le large sentier bifurque, pour se faufiler dans une gorge étroite. Les bien nommées « Gorges de l’Enfer ».

Le chemin de la Mature apparaît alors sans crier gare.

Le sourd vrombissement du gave monte de l’abîme.
Cueilli à froid, le randonneur pose généralement son sac au prétexte d’attendre les retardataires, prendre une photo, boire un coup et examiner la situation.

La falaise de calcaire gris semble entaillée d’un gigantesque coup de scie.

chemin de la mature

Chemin de la mature  ©B. Jamorski

Un cri, puis un autre brise le silence. Ils sont poussés par quelques tâches colorées collées comme des mouches sur le gris uniforme des parois calcaires. Ce sont des grimpeurs qui s’interpellent. La mâture est leur terrain de jeu.

Sur le chemin de la mâture, le vertige n’est pas véritablement à craindre sauf par des personnes ultrasensibles qui éprouveraient les mêmes émotions en montant sur une chaise.

Il n’y a pas lieu de s’angoisser, le chemin est large. L’histoire nous apprend qu’il devait permettre le passage d’un attelage de bœufs tirant des charrois chargés de longs fûts de sapin.
Une fois engagé, le vide n’est pas apparent sauf à faire turbiner plein pot son imagination. On peut pour la tromper observer la flore. Elle est unique en son genre. Thym, hélianthèmes et autres espèces aimant la chaleur ont naturellement colonisé les falaises surchauffées par leur exposition plein sud.

Le chemin de mature mériterait son classement aux monuments historiques.

L’épopée de la mature dans les Pyrénées commence sous Louis XIV, La marine de guerre du roi soleil est en pleine panade. En 1661, elle ne disposait que de 30 bâtiments. Son ministre Colbert commence alors un grand travail de reconstruction.  Louis XV le bien aimé continuera sur la lancée. Choiseul, son Premier ministre lorgne vers les Pyrénées dont l’altitude produit des bois plus résistants qu’en plaine. L’ingénieur Leroy est chargé de la besogne. Entre autres lieux, il jette son dévolu sur forêt du Pacq, au-dessus d’Etsaut en Vallée d’Aspe. Seul hic, l’accès semble impossible. Qu’à cela ne tienne, impossible n’est pas français. Il fera creuser un chemin en pleine paroi suffisamment large pour permettre le débardage des bois convoités. Les fûts étaient ensuite stockés à Athas, près de Bedous puis descendus par flottage jusqu’à Oloron sur le gave d’Aspe en crue.

L’entreprise était périlleuse. Avant chaque descente, les radeleurs se pressaient à la chapelle d’Athas pour y recevoir la bénédiction du prêtre. On n’est jamais assez prudent.

D’Oloron, le gave devenu débonnaire, permettait d’assembler les troncs en train de radeaux jusqu’à Bayonne.

L’épopée du chemin de la mature commencée en 1772 s’achèvera six ans plus tard avec la mise en coupe réglée de la forêt du Pacq devenue exsangue. Abandonné, le chemin de la mâture, attendra deux siècles pour recouvrer une seconde jeunesse grâce à la randonnée et au GR10.

Par Gérard Caubet

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